Christophe Koessler
Résumé: Que mettra-t-on à la place du capitalisme ? Ignorés pour l’instant par la gauche et les mouvements anticapitalistes, toute une série d’auteurs contemporains dressent les contours d’une économie débarrassée de l’exploitation de l’Homme par l’Homme. Certains parmi eux ont le mérite de proposer des modèles qui permettent de s’affranchir de manière radicale de la logique du profit, et sont profondément démocratiques, sans modifier de fonds en comble le mode de vie actuel des populations. Une société basée sur l’autogestion sur tous les lieux de travail, la propriété sociale des biens économiques, la préservation des marchés des biens et services courants (tout en les socialisant), la socialisation des investissements, une planification incitative de l’économie grâce à une démocratie participative, et le développement de services publics forts pour les biens publics et les besoins fondamentaux. Nous avons appelé ici ces propositions les «modèles autogestionnaires» puisqu’ils sont basés sur le principe de la gestion démocratique de leurs affaires par les premiers intéressés, autant sur les plans économiques que politique.
On sait de mieux en mieux ce qu’on ne veut pas. Mais connait-on vraiment les grandes lignes possibles d’une société débarrassée du capitalisme ? Pas vraiment.
La question est bien sûr culturelle. Adopter d’autres fonctionnements et d’autres institutions implique une transformation des imaginaires, des valeurs, un dépassement du fétichisme et de l’individualisme forcené. Cette transformation implique de retrouver confiance en nous-mêmes et en la société. La question est aussi sociale: quelles relations entre les êtres humains souhaitons-nous construire ? Ici, cependant, nous allons nous focaliser sur la question économique, qui est le plus souvent négligée à l’heure de penser à des alternatives au système actuel. Cela ne signifie pas que nous pensons que l’économie prime sur les autres dimensions de la vie en société, mais elle en fait indubitablement partie. Et cette question reste largement ignorée aujourd’hui.
Sans nécessairement se connaître mutuellement, plusieurs intellectuels contemporains en arrivent aux mêmes lignes de force qui pourraient structurer une économie non capitaliste. Il s’agit surtout du philosophe Tony Andréani en France, le mathématicien et philosophe David Schweickart aux Etats-Unis, l’économiste et sociologue Diane Elson en Grande-Bretagne. Des propositions reprises dans leurs grandes lignes par l’économiste et statisticien français Thomas Coutrot, membre du Conseil scientifique d’Attac (organisation qu’il a présidée de 2009 à 2016). Leurs visions ne sont pas non plus très éloignée de celles de Bernard Friot, sociologue et économiste qui a lui été sous les feux des projecteurs depuis plusieurs années en France en raison de son travail sur la question des retraites notamment.
Leurs propositions comportent des différences de taille, mais nous nous concentrons ici sur ce qui les rassemble. Et cela correspond à de nombreuses idées proposées par Pierre-Joseph Proudhon au milieu du 19ème siècle. Ces propositions ne doivent pas exclure des optiques plus radicales, mais permettre leurs réalisations simultanées, en les encourageant. Toute approche postcapitaliste doit être compatible avec d’autres perspectives d’alternatives.
Pourquoi ces modèles sont-ils pertinents ?
- Ils permettent d’imaginer comment notre société moderne, industrielle, complexe, pourrait s’organiser de manière non capitaliste.
- Ils permettent à la fois de nous émanciper des détenteurs du capital et de l’Etat, idéal commun des communistes et des anarchistes.
- Semblent faisables. Les auteurs de ces modèles insistent sur leur efficacité économique, avec des fondements empiriques, notamment l’expérience dans l’autogestion en Yougoslavie ou les coopératives Mondragon en Espagne (en montrant leurs limites), et théoriques. Ils s’appuient donc sur des expériences concrètes, d’aujourd’hui et d’hier, qui ont montré leur efficacité ou leur inefficacité.
- Ne s’éloignent que peu du fonctionnement économique actuel au jour le jour pour Madame et Monsieur tout le monde.
- Concilie la liberté individuelle et les choix collectifs.
Ces modèles font six propositions principales :
1) L’autogestion dans les entreprises ou lieux de travail
2) La propriété sociale des biens économiques
3) La préservation des marchés des biens et services courants
4) La constitution d’un fonds commun visant au financement des entreprises – la socialisation de l’investissement.
5) Une démocratie politique participative qui oriente l’économie vers des finalités décidées par la société. Planification incitative.
6) Le développement de services publics forts pour les biens publics et les besoins fondamentaux (santé, éducation, eau, logement, etc).
1) Partir de l’autogestion dans les entreprises.
Car l’autogestion, c’est rendre le travail aux travailleurs! Le travail est leur affaire! C’est récupérer notre souveraineté sur le travail.
L’autogestion, qu’est ce que cela signifie?
- A l’exemple de ce qui se fait actuellement dans de nombreuses coopératives, les travailleurs s’organisent librement en collectifs de travail / entreprises
- Ils décident démocratiquement de la gestion du travail, et des ressources qu’ils se voient confiés. Ils décident à la fois de ce qu’ils font et comment ils le font.
- Principe: une personne, une voix. horizontalité
- Élection d’une direction si nécessaire (pour prendre les décisions courantes, urgentes, sans avoir à en référer en permanence à tous), peut être révocable, tournante.
- Il n’y a plus de patrons!
Les travailleurs vendent des biens et services dont ils tirent des revenus.
- Mais ils paient des impôts ou des cotisations et des intérêts sur les prêts qu’ils reçoivent, qui servent au bien commun.
Comment sont-ils rémunérés?
Des propositions différentes sont possibles en matière de rémunération.
Pour Andréani: la rémunération des travailleurs dépend en partie des résultats des ventes de leurs entreprises autogérées. Le but est de motiver les travailleurs et qu’ils voient le bout de leur acte. Pourquoi mieux travailler si le fruit de mon travail part ailleurs ? Mais un minimum salarial doit être assuré. Pour éviter de trop grandes inégalités de rémunération entre les entreprises, Tony Andréani propose que les entreprises cotisent à un fonds commun de péréquation qui permettrait d’égaliser quelques peu les salaires entre les entreprises. Une autre idée serait d’avoir une grille salariale pour l’ensemble de la société, dotée d’une fourchette de flexibilité si besoin, et modulable selon les secteurs par exemple.
La proposition de Bernard Friot est radicalement différente à ce niveau puisque le salaire des travailleurs ne dépendrait pas du résultat des ventes de chaque entreprise. Un salaire « à vie » serait adopté selon le degré de qualification de l’employé (qui pourrait varier au cours du temps). On retrouve ici l’idée de grilles salariales pour l’ensemble de la société.
Ici, il n’y a plus de rapport direct entre ce que le travailleur donne et ce qu’il reçoit.
En autogestion, ce sont donc les travailleurs qui décident de la marche de l’entreprise. Mais dans les grandes sociétés, il est envisageable que d’autres acteurs co-décident dans les conseils d’administration des grandes entreprises : des représentants des consommateurs, des collectivités publiques ou des fédérations d’entreprises par exemple. Le but serait que les intérêts collectifs de la société puissent être exprimés au sein même des entreprises. Les plus grandes d’entre elles ayant un impact indéniable sur l’ensemble de la société.
Exemple pratique :
Tania et moi, nous sommes fans de tricot. Nous voulons ouvrir une fabrique de pullover. On a de super idées et on voudrait s’associer avec un ami designer qui a tout un concept dans sa poche. Mais on voit qu’il faudrait qu’on soit au moins 8 pour que notre projet aboutisse. On se réunit, on forme une entreprise, on décide de tout ensemble sur un pied d’égalité : les modèles que nous fabriquons, la répartition des tâches, si nous souhaitons nous développer ou rester petit, etc.
Ou on décide nous-mêmes de nos salaires en fonction des résultats de nos ventes, mais avec des limites posées par les instances politiques ou fédératives, ou alors des salaires sont imposés par la société en fonction de nos qualifications.
Nous décidons si nous avons besoin d’une direction qui peut être tournante et révocable…
Est-ce efficace ?
D’après Andréani, l’expérience a montré, que ce soit dans les coopératives ou dans les entreprises autogérées en Ex-Yougoslavie que cette manière de faire motive les travailleurs. Ils sont parties prenante de l’entreprise, ils ont l’occasion de faire entendre leurs besoins et leurs points de vue et ils sont intéressés aux résultats de l’entreprise.
2) La propriété sociale des biens économiques
La propriété privée étant une structure de base du capitalisme, quelle alternative pouvons-nous lui opposer ?
- Le socialisme a souvent erré entre deux visions de la propriété alternatives: faut-il la propriété de l’Etat ou la propriété des travailleurs (coopératives) ?
On a vu que la propriété d’Etat pose problème, conduit à la centralisation, à l’autoritarisme, à la bureaucratisation et à des décisions peu rationnelles d’un point de vue économique, à inefficience.
On conçoit aussi le caractère injuste d’une propriété très inégale entre ouvriers, qui possèdent des entreprises de très inégales valeurs et dont la possibilité de dégager des surplus est très variable. Suivant si je travaille dans l’entreprise X ou Y je peux m’en tirer financièrement beaucoup mieux. On conçoit aussi que dans ce cas les intérêts de la société ne sont pas représentés dans les entreprises.
Faut-il donc nécessairement avoir un propriétaire? Il parait plus juste et rationnel de déconstruire la propriété, concept assez récent, qui donne un ensemble de droits beaucoup trop étendus au propriétaire.
Usus : l’usage de la chose possédée
Fructus : tirer un revenu de la chose possédée
Abusus : vendre, transférer, transformer la chose possédée
Ces trois droits doivent être redistribués entre différentes instances pour permettre un équilibre de pouvoirs dans la société.
Ainsi, les travailleurs doivent avoir les droits d’usage sur la chose possédée (usus), en autogestion dans l’entreprise. Peut être aussi une partie des droits d’en tirer des revenus (fructus). Mais pas le droit de revendre les locaux ou les outils de l’entreprise (abusus). Cette fonction de vendre, ou de transformer devrait être attribuée à d’autres instances collectives avec une mission d’intérêt public, comme les confédérations des travailleurs d’une branche par exemple ou des institutions publiques, qui peuvent être mixtes, dépendant à la fois des fédérations de travailleurs et d’institutions de type citoyen / étatique.
Tony Andréani et Bernard Friot parlent de propriété d’usage pour les travailleurs associés (correspondant à l’usus). Et de « nu-propriétaire » pour la collectivité publique responsable de ce bien (correspondant à l’abusus), figure juridique qui existe déjà dans le droit français. Mais faut-il garder ce mot de propriété ?
3) Les marchés des biens et services
Les modèles autogestionnaires conservent le marché comme moyen de rencontre entre l’offre et la demande pour les biens et services privés. En opposition à une économie qui serait entièrement planifiée, comme en URSS, ou à une économie planifiée démocratiquement (comme le proposes les auteurs Michael Albert et Robin Hahnel).
On peut acheter et vendre librement de biens et services.
Les prix sont donc déterminés par l’offre et la demande, et sont affectés en grande part par la concurrence entre les entreprises.
On considère là les aspects positifs du marché, le marché est un bon moyen de savoir ce que les gens veulent, car ils l’achètent (en l’absence de publicité et d’autres moyens de biaiser la demande pour des biens et services). Il est aussi un moyen d’arriver à une certaine efficacité : les entreprises qui produisent de la mauvaise qualité ou trop cher ne peuvent continuer si les acheteurs peuvent se tourner vers d’autres fournisseurs1. Leurs travailleurs devront faire autre chose.
Se passer des marchés des biens et services?
Mais bien sûr les marchés ont des inconvénients. A la main invisible chère à Adam Smith, répond ici le pied invisible, qui donne des coups. Car les marchés ne prennent pas en compte les externalités de transactions, c’est-à-dire tous les impacts extérieurs d’un échange entre fabricants et consommateurs, comme la pollution par exemple. Les marchés induisent une concurrence entre entreprises qui peut obliger à exploiter les travailleurs, baisser les salaires augmenter les heures de travail, nommer des chefs qui les exploitent (donc contrevient à l’autogestion), etc. Les marchés favorisent les consommations individuelles plutôt que collectives et ne prennent pas en contact la différence de pouvoir d’achat entre les consommateurs.
Que devrait-on faire pour se passer des marchés des biens et services ? Soit une planification impérative où c’est l’Etat qui décide de quoi produire et à quels prix, comme en Union soviétique. Soit imaginer un système de planification démocratique et décentralisée comme l’a fait l’économiste contemporain étatsunien Michael Albert2. Un système envisageable mais qui a suscité un nombre important de critiques: lourdeur du mécanisme de déterminations de l’offre et de la demande où tout un chacun doit s’investir de manière importante. On peut craindre d’avoir une majorité absentéiste qui laisse faire une minorité s’engager activement dans la conception du plan.
S’il ne fonctionne pas bien, le système risque de laisser le champ ouvert à la résurgence de marchés au noir qui viendraient mettre à bas tout l’édifice. Le risque de tyrannie semble important aussi car le plan dépendrait de l’existence d’un bureau central chargé de compiler l’offre et la demande. Si l’offre et la demande ne s’ajustent pas bien démocratiquement, le danger est grand de voir cet organe décider à la place des populations. Ce système suppose aussi un bouleversement des modes de vie en matière de consommation et de production qui peut sembler difficilement envisageable aujourd’hui (plus d’achats spontanés – ou limités fortement, contrôle social de la consommation et de la production, etc.) et peu acceptable par une majorité.
Garder les marchés et mettre en place des contrefeux
Les socialistes autogestionnaires proposent de contrebalancer les effets délétères de marchés des biens et services plutôt que des les supprimer. Principalement de la manière suivante :
- Pour contrecarrer la concurrence délétère : « socialiser le marché », entre autres en prévoyant des coopérations obligatoires entre entreprises, sur les méthodes de travail et la technologie par exemple3, des grilles de salaires minimums – maximums (ou des fonds de compensation pour limiter les inégalités entre entreprises), des lois générales pour garantir l’autogestion en entreprise, une législation protectrice en matière d’horaires de travail, droits sociaux, (plus stricte et plus étendue qu’aujourd’hui), etc.
- Pour mitiger les externalités négatives des marchés: un plan incitatif (lire plus loin) favorise la production de qui est estimé utile, bon socialement et pour l’environnement (à travers des choix démocratiques), la constitution de services publics forts (pour favoriser les biens publics comme les transports collectifs, l’éducation, la santé, l’énergie et les communications, la recherche, la culture, etc), l’encouragement des associations de consommateurs et de protection de l’environnement, lois de protection de la nature, etc. Présence de représentants des consommateurs, des défenseurs de l’environnement et des collectivités publiques dans les directions de grandes entreprises.
Exemple de fonctionnement d’une petite entreprise
Donc une fois que nous aurons produit nos pullovers Tania et moi,
Nous pourrons vendre nos produits au marché nous-mêmes ou dans les petits magasins du quartier ou même peut-être en grandes surfaces (sociales).
Si on vend assez de pulls, tout va bien.
Par contre, si un nombre insuffisant de personnes achète nos pulls, on devra faire faillite. On ira au chômage jusqu’à former un autre projet ou rejoindre une entreprise existante à travers des réseaux publics d’emploi par exemple.
Comme on n’est pas dans le capitalisme, le plein emploi peut être un objectif clair de la société dans son ensemble et des institutions démocratiques. Le chômage serait donc très bas, et surtout très temporaire, donc ce n’est pas un gros problème de faire faillite.
4) Des fonds pour l’investissement socialisé
Pour qu’il n’y ait plus de rémunération de capital, les entreprises autogérées vont devoir se financer à crédit pour réaliser leurs investissements (acheter leurs matières premières, leurs outils, etc.).
On va donc leur prêter de l’argent pour qu’elles puissent fonctionner.
Dans ce système, c’est le travail qui loue le capital et non plus le capital qui loue le travail.
Tony Andréani propose que ce soit l’épargne des ménages et une épargne forcée des entreprises (une sorte de taxe ou de cotisation), qui serve de source de financement.
David Schweickart propose que les entreprises paient une taxe sur la valeur du capital fixe de l’entreprise.
Ces capitaux seraient récoltés pour être gérés par un fonds national de financement public ou par des banques socialisées et autogérées (qui sont aux mains des travailleurs eux-mêmes), ou les deux.
Ces institutions prêtent aux entreprises selon des critères d’efficacité. Ce qui veut dire que les banques vont devoir évaluer si les entreprises semblent en mesure de pouvoir produire les biens ou services qu’elles désirent à un prix qui rencontre une demande sur le marché. Et de sorte à ce que ces entreprises puissent payer les salaires des travailleurs + les intérêts du prêt.
Ce sont les banques ou les fonds publics qui évaluent la solidité des projets présentés.
Le but du fonds public ou des banques n’est pas de faire fructifier leur capital comme dans l’économie capitaliste. Il n’existe plus de rémunération du capital.
Andréani nous dit que nous avons besoin d’un agent indépendant comme les banques pour cette tâche. Si l’Etat se charge de financer les entreprises, il y aurait sans cesse un « marchandage » entre les entreprises et l’Etat. Certaines entreprises obtiendraient trop de capitaux, d’autres pas assez, et des entreprises qui devraient faire faillite continuent à exister.
Exemple pratique:
Tania et moi avons besoin d’acheter de la laine, des machines pour la filer, d’autres pour tricoter les pulls. Nous allons donc nous adresser à une banque socialisée de notre choix ou à un fonds public pour obtenir un prêt.
Si elle nous convient pas, ou refuse le prêt, nous pouvons aller en voir un autre bailleur.
Il faut que nous ayons un projet bien ficelé avec une étude de marché, une idée des coûts et des possibles revenus des ventes que l’on pourrait en tirer, et ainsi tenter de convaincre le financeur.
La banque va nous prêter si elle estime que nous pourrons payer les salaires de tous les travailleurs prévus et rembourser le prêt, les intérêts et payer nos impôts.
5) Une démocratie politique participative qui oriente l’économie vers des finalités décidées par la société
Les instances politiques, élues, décident des grandes orientations de l’économie à travers un plan incitatif. Tout un débat doit avoir lieu sur la forme que devrait prendre les nouvelles instances politiques pour qu’elles permettent une réelle démocratie. Les propositions vont d’assemblées locales populaires et confédérées (à la Murray Bookchin) à des institutions plus proches que celles qui existent actuellement (représentations parlementaires) mais radicalement démocratisées (par différents moyens : tirage au sort ?, rotations, votations en démocratie directe, etc).
Il y a un donc pilote dans l’avion de cette économie.
Les instances politiques vont agir à travers des taux d’intérêts différents, des taux d’impôts différents, et des subventions ou des dotations en capital plus ou moins importants en fonction des secteurs à favoriser.
Exemple : favoriser la production de vélos électriques plutôt que de voitures grosses consommatrices en carburant.
La production de vélo électrique bénéficiera de prêt à 1%, celui de véhicules 4×4 de 20%. Ainsi, on n’interdit pas forcément toute production jugée (démocratiquement) comme néfaste, mais ce qui l’est revient beaucoup plus cher à produire.
Tania et moi auront un prêt à tôt préférentiel car la laine que nous prévoyons d’acheter est bio, et la production de vêtements (qui fait partie des besoins fondamentaux) est mise sur la liste des priorités par les instances politiques. Donc nous pourrions même bénéficier d’une subvention spéciale et d’impôts avantageux.
6. Développement de services publics producteurs de biens communs. Gratuits ou semi-gratuits.
Biens publics qu’Andréani lie à la citoyenneté. Si on n’a pas un toit, l’éducation et la santé on ne peut exercer correctement son droit à la participation démocratique.
C’est déjà le cas aujourd’hui pour la santé, l’éducation, les bibliothèques, les transports publics, l’aménagement urbain, etc.
Cette logique peut être étendue à d’autres biens de base: le logement par exemple, l’électricité, Internet, des «objetstothèques» (appareils photos, outils, instruments de musique, etc.).
Pour Andréani, ces biens sociaux seraient sortis du secteur autogéré et produits par des administrations publiques ou des entreprises publiques répondant à des mandats précis de l’autorité publique. Comme elles répondent à un mandat précis, il considère que ces administrations ou entreprises publiques ne sont pas « autogérées », même si on peut estimer que leur fonctionnement interne doit rester démocratique et horizontal, pour autant qu’elle respecte le mandat qui leur est confié.
Notes :
1 Il est nécessaire ici que des informations fiables circulent sur les produits, notamment grâce à des associations de consommateurs subventionnées.
2 Michael Albert, Parecon, Participatory economics, Life After capitalism, Verso, New York, 2003. // En Français, traduction d’un autre ouvrage antérieur: Michael Albert, Après le capitalisme, éléments d’économie participaliste, Agone, Paris, 2000.
3 « Dans le modèle de Diane Elson, des commissions (publiques) des prix servent d’abord à faire circuler l’information détenue par les entreprises (publiques) sur leurs méthodes de production, sur leurs coûts et sur leurs marges, par l’intermédiaires de réseaux publics d’information auxquelles elles sont obligatoirement affiliées. Cela rend possible une coordination entre les entreprises, et aussi une information du consommateur. Elles peuvent à partir de là définir des normes de prix, qui ne sont plus des normes imposées, mais des normes négociées de référence, souffrant des exceptions qui doivent être justifiées. Point de planification a priori donc, mais une régulation en évolution constante. Des commissions des salaires font de même en ce qui concerne les offres et demandes d’emploi, avec leurs différentes caractéristiques. » in Tony Andréani, Dix essais sur le socialisme du XXième siècle, page 70.
Bibliographie
Tony Andréani, Le socialisme est (a)venir, Syllepse, 2001, Tome 1 et 2.
Tony Andréani, Dix essais sur le socialisme du XXIème siècle, Le Temps des Cerises, 2011. lire en particulier le chapitre “Les modèles de socialisme”.
David Schweickart, After Capitalism, Rowman and Littlefield Publishers, Lanham, Oxford, 2002.
David Schweickart, « La démocratie économique, un socialisme véritable et réalisable », in: Actuel Marx n°14, Nouveaux Modèles de Socialisme, PUF, Paris, deuxième semestre 1993.
Diane Elson, « Market socialism or socialization of the market », in New Left review, nov-déc. 1988. Article repris en partie dans Actuel Marx, n°14, 1993.
Michael Albert, Après le capitalisme, éléments d’économie participaliste, Agone, 2003.
Michael Albert, Parecon (participatory economics), Life after capitalism, Verso, London / New York, 2003.