Iniquité
Pour Michael Albert, le marché favorise l’iniquité car, en théorie, il rémunère les travailleurs en fonction de la quantité et qualité respectives qu’ils sont capables de produire. Or ceci dépend de caractères génétiques, éducationnel (+ talents, capacités et outils) et autres. Dans les autres facteurs, on peut compter par exemple le fait qu’une personne est plus à même de supporter un refus ou l’échec de l’obtention d’un accord car elle est dans une position plus favorable. Exemple: une femme seule avec un enfant malade sera moins à même de négocier dans des termes favorables avec un employeur qu’une personne seule sans charges. De même, une personne dont le caractère sera respectueux des autres personnes sera à son désavantage vis-à-vis d’une personne égoïste. Le système favorise d’ailleurs l’égoïsme.
Mais en vérité, les marchés ne rémunèrent pas directement en fonction des contributions respectives des travailleurs, et ceci pour deux raisons:
- La valeur des contributions de chacun sur le marché n’est pas déterminé seulement par les besoins et désirs relatifs des gens, mais aussi par la distribution des revenus qui permet aux acteurs d’exprimer leurs besoins et leurs désirs. Par exemple, la contribution d’un chirurgien plastique qui refait des nez à Hollywood sera plus grande que la valeur d’un médecin de famille qui sauve des vies dans un petit Comté rural d’Oklahoma, même si le travail de ce médecin apporte un beaucoup plus grand bénéfice social que le chirurgien de Hollywood.
- Les marchés incluent seulement dans leurs évaluations les volontés des acheteurs et vendeurs immédiats. Ils ne tiennent comptent ni des externalités négatives ou positives de la transaction sur les autres (pollution / impact sur les autres par l’achat d’un livre), ni des effets de la transaction à long terme.
Tout ce ceci ne peut être corrigé dans l’économie de marché sans engendrer une inefficacité très importante. Lire les pages 61-63 du livre de Parecon Life, after capitalism, Verso, 2003.
Entrave la solidarité et favorise la compétition et la rivalité individuelle
Les marchés minimisent les coûts de transaction de certaines formes d’interactions économiques, en particulier celles qui sont personnelles et impliquent des acteurs privés, les facilitant de ce fait, mais les marchés ne font rien pour réduire les coûts de transaction et faciliter d’autres formes d’interaction, en particulier celles qui sont publiques et entraînent et des interactions collectives.
Bowles (cité par Albert, p.67 de Parecon):
« The beauty of the market, some would say, is precisely this: it works well even if people are indifferent towards one another. And it does not require complex communication or even trust among its participants. (…) By economizing on valuable traits – feelings of solidarity with others , the ability to empathize, the capacity for complex communication and collective decision-making, for example – markets are said to cope with the scarcity of these worthy traits. But in the long run markets contribute to their erosion and even disapearance. What looks like a hardheaded adaptation to the infirmity of human nature may in fact be part of the problem. »
p. 66 Tous les acteurs économiques sont forcés à être anti-sociaux (compétition, volonté d’obtenir un prix maximum du consommateur) et manquent de toute manière les moyens de faire autrement (information sur comment ma production ou ma consommation affectent les consommateurs ou les producteurs et les citoyens en général (externalités)).
p.67 « What ought to be the case – economic actors sharing benefits and costs and moving forward or back in unison with the interest of each actor – is turned topsy-turvy, to the point where each actor’s interest is opposed to that of all others. »
Contre l’autogestion
Si les travailleurs s’organisent et s’associent pour décider de la production et comment se partager les ressources dans une économie de marché, ils finiraient, à cause de la concurrence par recréer une société de classe en engageant une classe de managers qui voudra bien réduire les salaires et renvoyer des employés pour que la firme soit plus compétitive.
Voir Parecon, p. 69-70: « markets therefore have a built-in pressure to organize a work force into two groups: a large majority that obeys and a small minority that makes decisions, with the latter enjoying greater income, power, and protection from the adverse effects of the cost-cutting decisions they will impose on others. In other words, the information, incentive, and role characteristics of market systems subvert the rationale for workers to take initiative in workplace decisions even if they have legal right to do so.
Inefficacité – Externalités
La face sombre des marchés en termes d’inefficacité à été négligé par la plupart des économistes. A la métaphore de la main invisible correspond celle d’un « pied invisible » » pour décrire le comportement contre-productif caractérisé par l’imposition des coûts externes à d’autres que le marché promeut également.
L’exclusion de la transaction de toutes les parties affectées par celle-ci, à l’exception du vendeur et de l’acheteur caractérise le marché. Cette exclusion est une source de gain majeur pour les consommateurs et les producteurs.
Lorsque l’on pense aux externalités du marché, on se réfère souvent à des phénomènes courant comme la pollution, l’effet d’une publicité pour le tabac sur la santé publique, etc. On ne se rend pas compte que les effets extérieurs d’une transaction marchande sont plus la règle que l’exception (p.14). En effet, toute action d’une personne ou d’une entreprise qui induit un plaisir ou une peine à quelqu’un d’autre dans le cadre du marché constitue une externalité. En d’autre termes, les externalités sont généralisées (pervasive).
Pour plusieurs raisons, corriger ces externalités n’est pas possible (p. 74-75 de Parecon) : 1) il n’existe pas de procédures pratiques et fiables dans les économies de marché pour estimer l’amplitude de ces effets. 2) les bénéficiaires d’éventuelles taxes correctives sont dispersés au sein de la société, ils ne peuvent donc s’organiser pour défendre leurs intérêts et réclamer de telles taxes. 3) les personnes profitent des biais du marché …..
« When some kinds of preferences are consistently under-represented because of transaction cost and free riding problems (wherein folks get the benefit of public goods without paying for them), when some resources are consistently over-exploited because they are common rather than private property, when consumers adjust their preferences to biases in the price system, and when profits or surpluses come as often from greater power as greater contribution, theory predicts free market exchange will result in a misallocation of ressources. And when markets are less than perfect (which they always are) and fail to reach equilibrium instantaneously (which they always do), the results will be that much worse. »